Nouvelle orthographe et tréma (2 de 3)

« L’emploi du tréma est amélioré ».

Je ne l’aurais jamais cru.

 – 2 –

               Nous avons vu précédemment que la règle C 3.1 de la nouvelle orthographe, celle qui impose le déplacement du tréma du i ou du e sur le u (ex.  ciguë / cigüe),  ne facilite ni la prononciation ni l’écriture des mots visés. Son utilité est donc fort douteuse. D’ailleurs les principaux dictionnaires de langue (NPR 2010, Larousse en ligne) n’ont toujours pas, vingt ans plus tard, emboîté encore le pas au CSLF sur ce point.

Voyons maintenant ce qu’il en est de la seconde règle (C 3.2). Cette fois-ci, il ne s’agit plus de déplacer le tréma, mais bien d’en ajouter un. Sur deux mots seulement : arguer et gageure.   Voici la règle :

C 3.2 Afin de corriger des prononciations jugées défectueuses, le tréma est ajouté :

  • sur le verbe arguer (il rime avec tuer et non avec naviguer)
  • sur les mots se terminant par –geure (ex. : gageüre) parce que ces mots riment avec jure, et non avec heure.

Ex : argüer (il argüe, argüait, etc.) et les mots rares : bringeüre, égrugeüre, envergeüre, mangeüre, une rongeüre, renvergeüre, vergeüre.  (Cette liste d’exemples est presque complète.)

Cette « rectification » améliore-t-elle l’emploi du tréma? Apporte-t-elle « à l’orthographe du français encore plus de logique et de rigueur », comme on le prétend dans l’avant-propos du Grand Vadémécum (p. 3)? C’est ce que nous allons voir. Dans ce deuxième billet, nous allons nous concentrer sur le premier mot visé : arguer, réservant pour plus tard l’examen de gageure.

Le problème à corriger est, cette fois, clairement formulé : la prononciation de arguer est « défectueuse »; ce verbe rime avec tuer et non avec naviguer. Si, comme on le dit, la prononciation de ce mot est « défectueuse » – pourrait être serait préférable  –, cela implique qu’il en existe une autre, qui serait la « bonne ». Ce corollaire m’amène à me poser des questions sur ce qui est bon et ce qui n’est pas bon.

  •  Qui décide que telle prononciation est « bonne » et que telle autre est « défectueuse » (« erronée » ou « fautive », selon la terminologie du Grand Vadémécum, p. 22)?
  • La prononciation d’un mot peut-elle changer avec le temps?
  • Depuis quand la prononciation de tel mot est-elle dite « fautive »?
  • Sur la base de quoi?
  • La « faute » est-elle si fréquente qu’il faille à tout prix intervenir?

N’étant pas linguiste, et encore moins phonéticien, je vois le problème avec les yeux du commun des mortels, qui se pose des questions sur la pratique et non sur la théorie. À chacune de ces questions, je pourrais fournir des exemples, mais rien ne me dit que ces derniers ne seraient pas des exceptions. Me revoilà donc gros Jean comme devant.

 Arguer devrait dorénavant s’écrire Argüer!

On corrigerait ainsi sa prononciation « défectueuse »! C’est du moins ce que l’on prétend. Cette règle a une portée très limitée, car, dans le NPR 2010, arguer est le seul et unique verbe en guer (sur un total de 79) dont le u se prononce. Cette application restreinte n’est toutefois pas une raison suffisante pour que nous soyons des béni-oui-oui, i.e. « des gens toujours disposés à approuver les initiatives d’une autorité établie ». Ce n’est pas non plus une raison pour que nous la rejetions. Il faut l’évaluer à sa juste valeur.  Quel est donc son rapport qualité/prix?, dirait le consommateur de langue, que sont le rédacteur et le locuteur. C’est ce qu’il me faut déterminer avant de pouvoir me prononcer sur l’initiative du CSLF.

Arguer s’est toujours écrit sans tréma. Et cela, depuis au moins 1606 (Voir  Dict. d’autrefois). C’est dire que, pendant des siècles, on a su le prononcer correctement, et cela sans l’aide d’un tréma. Le manque de correspondance entre sa graphie et sa prononciation n’a donc jamais soulevé les passions. Même Vaugelas est resté muet sur le sujet, lui qui se faisait un devoir de relever toutes les « mauvaises » façons de dire les choses. Ce silence ne signifie pas pour autant que cette discordance n’ait jamais été relevée. J’en ai trouvé trace dans deux dictionnaires : le Dictionaire critique de la langue française (1787-88), de Jean-François Féraud, et le Dictionnaire de la langue française (1872-77), d’Émile Littré.

  • Féraud écrit à propos du tréma :

Il serait bon qu’on le mît aussi en certaines ocasions sur l’a et sur l’o pour diférencier; par ex. Il argüa, nous argüons, qui se prononcent argu-a, argu-on, de nargua, narguons, qu’on prononce nargha, narghon.

Mais Féraud n’a pas fait école. Il faut reconnaître qu’il ne formulait qu’un souhait : il serait bon… Le verbe a donc continué à s’écrire sans tréma et sans autre intervention des régents de la langue. Le risque de confusion avec le verbe narguer semblait donc moins problématique aux autres qu’à Féraud.

  • Cent ans plus tard, Émile Littré revient à la charge :

ARGUER.1 (ar-gu-é) L’Académie ne conjugue pas ce verbe ; mais il faut écrire avec tréma : j’arguë, tu arguës, il arguë ; et même il serait bien d’écrire argüer, argüant, argüé, pour indiquer la prononciation ; autrement on le confondrait avec le verbe arguer.2.

 J’aimerais attirer votre attention sur les trois segments soulignés, car ils sont lourds de sens.

  1. Il faut écrire : Il ne s’agit pas ici d’un vœu pieux, mais bien d’une prescription, d’un ordre. Il faut mettre un tréma sur j’arguë, tu arguës, il arguë. Là se termine toutefois l’obligation.
  2. Il serait bien : Ici, il ne s’agit plus d’un ordre, mais bien d’un souhait. Et ce qui serait bien, c’est de mettre un tréma sur le u suivi d’un –a, d’un –é ou d’un –er : ex. argüer, argüant, argüé. À remarquer qu’il n’est nullement question d’en mettre un sur le u suivi d’un  –i, comme dans nous arguions. [Voir la note (1) à la fin du billet.]
  3. On le confondrait avec le verbe arguer.2 : Cette fois, le verbe avec lequel il y a confusion possible n’est plus narguer (comme pour Féraud), mais arguer. 2! Il y aurait donc des« bessons », des « Dupont et Dupont », des homographes non homophones. Voilà un argument qui semble avoir plus de poids que celui de Féraud, même si je le trouve étonnant. Personnellement, je ne lui connaissais pas de jumeau. Mais, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’en a pas. Il est très dangereux de juger de la richesse d’un lexique à l’aune de ses propres connaissances, surtout quand on est réviseur. Qui donc est ce jumeau, ce « arguer.2 », que je ne connais pas? – En dictionnairique, on accole un « 2 » avant le mot (parfois après) quand les deux homographes n’ont pas la même étymologie. –  Voici la définition que le Littré  donne de ce verbe : « 2. ARGUER [ar-ghé ; il argue se prononce il argh’] v. a. Technologie. Passer un fil de métal par les trous de l’argue. »

Littré avait donc une bonne raison de craindre qu’on confonde ces deux verbes, qui figuraient déjà, en 1860, dans le Grand dictionnaire universel (p. 614), de P. Larousse. Mais force est de reconnaître que Littré n’a pas, lui non plus, fait école. Et l’Académie d’alors (DAF 6e éd., 1878), qu’en dit-elle? Elle ne consigne qu’un seul verbe arguer, celui qui a encore cours de nos jours. Le besson, arguer.2, « a vécu ce que vivent les roses : l’espace d’un matin ». En effet, il n’a fait qu’une brève apparition dans le DAF : le temps d’une édition, et d’une seule, celle de 1835. D’ailleurs l’Académie n’a  jamais été sensible au problème de prononciation « défectueuse », ou supposée défectueuse, que mentionne le CSLF. Depuis 1762 (DAF, 4e éd.), elle se contente d’indiquer que le u se prononce dans argu-er. Mais, le Littré,  le Larousse universel et le DAF (6e éd.), c’est, direz-vous, de l’histoire ancienne, cela date du XIXe siècle. Et vous auriez tout à fait raison. Alors, qu’en est-il aujourd’hui?  L’argumentation tient-elle encore la route? On doit répondre que non. Le Petit Robert (dont  le Littré est la principale source d’inspiration) n’a jamais inclus ce jumeau dans sa nomenclature (de 1967 à 2010). Et le Petit Larousse ne le mentionnait déjà plus en 1905, même s’il figurait dans le Grand Larousse de 1903. Bref, le danger de confondre ces deux verbes a certes existé, mais il n’est plus actuel.

Dans le Robert (1958), dit le Grand,  on peut lire la remarque suivante :

Selon Littré, il convient de mettre un tréma sur l’e muet et sur l’i (1) qui suivent le radical : J’arguë, nous arguïons. Arguër, à l’inf., semble (2) archaïque.

Quel sens donner à « Il convient de »? Est-ce une simple suggestion ou un ordre déguisé? D’après le NPR, « il convient de »  signifie : « Être conforme aux usages, aux nécessités, aux besoins. Il convient de respecter une minute de silence. » Autrement dit, c’est dans l’ordre des choses de… Mais on ne va pas jusqu’à en condamner l’omission ni en imposer l’usage.

Le Robert, en ne prescrivant pas de tréma, se distancie de son maître, le Littré. La prononciation de arguer ne serait donc devenue problématique que depuis peu. Et peut-être, uniquement à certains, dont ferait partie le CSLF!

Mais comment expliquer que cette discordance entre graphie et prononciation devienne tout à coup manifeste, elle qui est passée inaperçue pendant des siècles? Cette « faute » est-elle si fréquente qu’une correction s’impose? On pourrait le croire, mais qu’en est-il vraiment? La fréquence (3) de cette « faute » est-elle à la hauteur de celle de son utilisation? Bien malin qui pourrait répondre à cette question, même si le CSLF le laisse entendre en se donnant la peine de formuler une règle sur ce cas très particulier.

Essayons d’y voir plus clair. Le verbe arguer fait presque partie de mon vocabulaire actif. Je dis presque, car  je ne l’utilise que très rarement. De plus, ce verbe, je ne le rencontre qu’en de très rares occasions. Et qu’en est-il pour vous? Croyez-vous que sa prononciation soit souvent « fautive »?

Il est bien certain que si l’on demande à quelqu’un qui ne connaît ce verbe ni d’Ève ni d’Adam de lire à voix haute il argu-e, il prononcera fort probablement il argue. Là, la présence d’un tréma pourrait lui être utile – à la condition évidemment qu’il sache la fonction de ce signe et ses exceptions. Du moins c’est ce que la règle nous porte à croire. Mais, s’il en connaît le sens, sa prononciation ne devrait pas être « fautive », car argu-er et argu-ment sont de la même famille. Savoir prononcer l’un n’est-ce pas savoir prononcer l’autre? Donc, le tréma est, à la limite, une garniture inutile, un élément défigurant. Est-ce pour cela que le Petit Robert n’a toujours pas admis cette graphie, plus de 20 ans après l’intervention du CSLF? Cela est possible.

L’argument reliant l’ignorance d’un mot et sa « mauvaise prononciation » (ou sa mauvaise graphie) est-il sans valeur? Si vous avez quelque réticence à l’admettre, rappelez-vous le mot laguiole, dont j’ai parlé dans le précédent billet. Comment l’auriez-vous prononcé avant de savoir ce qu’en dit le NPR? Il est bien évident que, si ce mot fait partie de votre vocabulaire, vous le prononceriez correctement. Si, dans une dictée, comme B. Pivot savait les faire, on parlait de différents fromages, dont le [lajɔl], comment auriez-vous écrit ce mot, si vous ne le connaissiez pas? La prononciation ne vous aurait été d’aucun secours pour en déduire la graphie. Comme il n’existe aucun autre mot de même famille, vous n’auriez pas non plus de repère pour vous guider. Alors, la probabilité de faire une « faute » en l’écrivant est très élevée. C’est, je l’espère, une démonstration assez claire que « ignorance d’un mot » et « faute » sont intimement liées.

             Revenons donc à arguer. Si quelqu’un ne connaît pas ce verbe, il ne l’utilisera pas. Donc aucun risque de faire une faute. Mais s’il le lit à voix haute, il risque fort de mal le prononcer. J’en conviens. Mais serait-ce le seul mot qu’il ne connaît pas et qu’il prononcerait mal? Certes pas. Repensez à laguiole. Est-ce une faute si fréquente que l’ajout d’un tréma sur le u de arguer s’impose pour « apporter à l’orthographe du français encore plus de logique et de rigueur », comme on le prétend dans l’avant-propos du Grand Vadémécum (p. 3)? J’ai des doutes; le Petit Robert, lui, n’en a aucun et il n’en a toujours pas, vingt ans plus tard. En effet, dans le NPR 2010, on lit : « Le u du radical se prononce dans tous les cas (comme dans tuer); ex. il argue [aʀgy]). » La « rectification » du CSLF, il l’oublie ou plutôt il l’ignore.

Bref, écrire argüer au lieu de arguer ne me semble pas LA solution à cette prétendue prononciation « défectueuse ». Si on connaît le mot, on sait que le u doit se prononcer, car il fait partie de la même famille que argument. Si on ne connaît pas le mot, on ne l’utilise. Donc aucun risque de s’y tromper. Sans oublier que le tréma, comme nous l’avons vu précédemment,  ne remplit pas toujours la fonction qui lui est traditionnellement dévolue en phonétique. Il suffit de penser à foëne [fwɛn] ou encore boësse [bwɛs]. Alors s’imaginer que l’ajout d’un tréma rectifie le tout, comme par miracle, me semble relever de la pensée magique. C’est, selon moi, une « rectification » qui ne mérite pas qu’on s’évertue à l’imposer.

Maurice Rouleau

(1)  La lecture que je fais du Littré diffère de celle qu’en fait le Grand Robert. Littré n’a jamais  dit qu’il fallait mettre un tréma sur le i. Attribuer cette exigence à Littré me semble risqué.

(2)  Que faudrait-il pour que arguër ne semble plus « archaïque »? Tout simplement qu’on puisse en  faire la preuve. De toute évidence, le Robert ne peut la faire. L’emploi de sembler est risqué, car ce qui semble à quelqu’un (le Robert en l’occurrence) peut facilement devenir est  pour quelqu’un d’autre. N’est-ce pas ainsi que naissent les légendes urbaines? Et, par contagion, les légendes « linguistiques »? Ces deux types de légende ont un point en commun : elles ne sont pas vérifiables! Serait-ce en raison de son caractère supposé « archaïque » que argüer n’a jamais été reconnu par le Robert (Grand et Petit)?

(3)   En langue, on utilise allègrement fréquent, mais rarement fréquence. Contrairement au substantif, l’adjectif traduit souvent une perception, une impression. Et une impression n’a pas à être démontrée, à être documentée! Fréquence, par contre, a une valeur objective, quantifiable. On ne l’évalue pas au pif!

PROCHAIN  BILLET

Nous examinerons, dans le prochain et dernier billet de cette série, la pertinence de mettre un tréma sur gageure, dans le but exprès d’en « rectifier » la prononciation.

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12 commentaires pour Nouvelle orthographe et tréma (2 de 3)

  1. Marc81 dit :

    Dupré cite un argument encore plus invraisemblable en faveur de la prononciation argu-é : « La prononciation de l’u évite, au participe présent, la confusion (…) en arguant avec en narguant [du verbe narguer] » (Etienne Le Gal, Le parler vivant au XXe siècle, Denoël, 1960). Pour le moins cocasse…
    Pour le reste, Hanse et Thomas préconisent de mettre un tréma sur le e caduc et sur le i qui suivent le radical.

  2. Je lis dans cet exposé passionnant : « Bref, écrire argüer au lieu de arguer ne me semble pas LA solution à cette prétendue prononciation « défectueuse ». Si on connaît le mot, on sait que le u doit se prononcer, car il fait partie de la même famille que argument. Si on ne connaît pas le mot, on ne l’utilise (pas). Donc aucun risque de s’y tromper. »
    Pour ma part, j’entends une majorité écrasante de personnes (en Suisse comme en France) qui l’utilisent en le prononçant comme ‘narguer’ au lieu de ‘tuer’. Cela signifie-t-il qu’elles utilisent un mot alors qu’elles ne le connaissent pas? Ou alors qu’elles ne connaissent pas un mot qu’elles utilisent?
    C’est le seul point de votre démonstration qui ne me convainque pas. Si la solution ne semble pas consister à utiliser le tréma, j’en conviens volontiers, encore faudrait-il que les prescripteurs – tels les journalistes (radio et télévision), les hommes politiques ou toute personne ‘publique’ appelée à l’utiliser oralement – puissent bénéficier d’un cours de rattrapage accéléré; …à défaut, de se voir signifier l’interdiction de l’utiliser.

    • rouleaum dit :

      Votre témoignage est pour le moins troublant. Et les deux possiblités que vous soulevez pour expliquer cette mauvaise prononciation sont réelles, mais je ne les aurais pas crues possibles. J’ai sans doute trop rapidement généralisé. À partir de mon expérience personnelle. Jamais, je ne m’aventurerais à utiliser un mot que je ne connais pas. Mais il semblerait que ce ne soit pas le cas partout. Hélas!

      • Cher M. Rouleau, à peine ai-je écrit mon premier commentaire sur votre site – découvert avec jubilation cela fait à peine deux heures – que je reçois une réponse de votre part; quelle promptitude, et surtout quel respect pour vos lecteurs! Merci de tout cœur.
        Quant à notre sujet, ARGUER, je pense que les mauvais exemples se reproduisent tout aussi rapidement que les bons, et d’autant plus facilement dans le monde médiatisé d’aujourd’hui. Vous aviez d’ailleurs relevé plus haut que le problème de la prononciation correcte de ce mot n’avait pas fait de grandes vagues jusqu’il y a peu. Je pense que la raison pourrait en être ces fameux ‘prescripteurs’, comme je les appelle, qui ont aujourd’hui une audience de millions de personnes à l’instant même où ils s’expriment.
        Un exemple très actuel: depuis peu, l’expression ‘low cost’ est utilisée très fréquemment par divers journalistes de radio et de TV, en France tout au moins, pour qualifier telle ou telle compagnie d’aviation, chaîne d’hôtels ou de restaurants à bas prix. A part d’être du franglais, le problème est qu’ils le prononcent TOUS ‘low coast’, (côte basse si vous préférez…). Comme l’expression est à la mode, j’entends de plus en plus de personnes de mon entourage la reprendre à leur compte, en la prononçant comme leur journaliste préféré, même si leur prof d’anglais, au lycée, n’a jamais confondu ‘cost’ et ‘coast’. Vous me pardonnerez ce détour par l’anglais: je pense qu’il illustre assez bien la différence qu’il y a entre ‘l’usage’ et le ‘bon usage’…
        J’au lu et relu tout à l’heure l’article sur le genre de GENS: un régal! Pour conclure, il le faut bien, on pourrait dire: protégez-moi de mes amis; les faux-amis, je m’en charge!

        • rouleaum dit :

          Vous écrivez : « Un exemple très actuel: depuis peu, l’expression ‘low cost’ est utilisée très fréquemment par divers journalistes de radio et de TV, en France tout au moins… »

          Vous venez de mettre le doigt sur le « bobo ». Les journalistes sont de gens de pouvoir, sans nécessairement en être conscient. Ils commandent l’usage des mots. Comment parler à un ami de ces chaînes d’hôtels ou de ces compagnies d’aviation sans ré-utiliser leur vocabulaire?

          Nous avons, ici, au Québec, le même problème. Il n’est pas français, ni suisse, ni belge. Il est, tout court.

          Si au Québec nous entendons, à la radio comme à la télévision, le mot week-end, c’est que les journalistes, les lecteurs de nouvelles l’emploient. Ces mots utililés par les prescripteurs, comme vous les appelez, entrent subrepticement dans l’inconscient linguistique et ressortent spontanément quand le besoin se fait sentir. Pourquoi, pensez-vous que nous utilisons week-end? Parce qu’en France il est utilisé. Pour bien paraître, les journalistes font de même. On ne dira pas d’eux qu’ils utilisent un langue qui n’est pas à la hauteur… à la hauteur de celle des Français.

          On est toujours influencés par quelqu’un. En langue, comme en toute autre matière.

      • … et puis, je m’interroge à propos de la phrase « …je ne les aurais pas cruES possibles. » J’aurais écrit …’CRU possibles’ comme dans la phrase (un peu tarabiscotée): ‘Ces personnes, je les ai crues, mais je les avais cru mieux renseignées.’

        • rouleaum dit :

          Votre commentaire me désarçonne.

          Avant de vous répondre plus longuement, je vais fouiller mes ouvrages de référence. J’ose espérer que j’ai fait, si tel est le cas, une faute « intelligente ». Mais tout est possible, je ne suis pas infaillible. Je vous prie d’être patient, je vous reviendrai sur ce sujet.

  3. duc dit :

    les journalistes sont de moins en moins crédibles, intonation à l’appui. Mais qui peuvent occasionner grand mal.

  4. Nordvik, Nils, Axel dit :

    Quid de la prononciation correcte de « jungle » et de « yacht » en 2016 bientôt, tout comme de « dégingandé » ?Grand merci d’avance et bonne année à venir !

    • rouleaum dit :

      J’aborderai dans un avenir plus ou moins rapproché la question du rapport entre orthographe et prononciation. J’accumule présentement du matériel. Je vous remercie pour les deux cas que vous portez à mon attention. Surtout « jungle ». Je n’aurais jamais cru qu’on puisse le prononcer jONgle.

  5. Penda Solene Sall dit :

    J’ai lu et écrit le verbe « arguer » à de nombreuses reprises sans jamais m’interroger sur sa prononciation, et ce en sachant pertinemment qu’il dérivait de la même racine que « argument »…
    Je le rencontre assez souvent dans le cadre de mes études, mais jamais à l’oral, et je ne savais pas jusqu’à ce jour que le « u » était supposé se prononcer. Je pense que cela montre bien que la connaissance d’un mot et de son étymologie ne garantit en aucun cas que l’on respecte la prononciation prescrite.
    Après tout, il n’y a rien de choquant à ce que des mots qui partagent une racine se prononcent différemment : dans « aqueduc » le « u » est muet, tandis qu’il se prononce dans « aquifère », et les exemples abondent.

    • rouleaum dit :

      Je suis en parfait accord avec ce que vous dites. Mais, compte tenu de la Nouvelle Orthographe, tous ne sont pas de notre avis.

      Il est vrai que la prononciation et la graphie ne vont pas toujours de pair. La question que l’on peut se poser, sans nécessairement pouvoir y répondre, c’est la suivante : Pourquoi devoir prononcer le u de aquifère mais pas celui de aquilin?

      On aurait pu penser que cette différence s’expliquait par la voyelle qui suit le u, mais, de toute évidence, cela n’est pas le cas. Il suffit de penser à anguille et à aiguille.

      Voilà un sujet sur lequel je pourrais m’attarder un de ces jours.

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